La Commission européenne freine-t-elle la consolidation du transport l’aérien ?

La Commission européenne a récemment renforcé ses exigences en matière de concurrence dans le secteur du transport aérien. Et plusieurs organisations (ECTA, ACI, EU Travel Tech, EPF, BEUC) dénoncent les risques d’abus de position dominante des cinq plus grands groupes aériens européens…

Il y a un mois, la Commission européenne ouvrait une enquête pour évaluer le projet d’acquisition d’ITA Airways par Lufthansa. Elle déclarait alors avoir « des inquiétudes préliminaires quant au fait que l’opération pourrait réduire la concurrence sur le marché des services de transport aérien de passagers sur plusieurs liaisons court-courriers et long-courriers à destination et en provenance de l’Italie ». Coup de pouce inattendu, la Commission est encouragée dans sa démarche par plusieurs organisations souhaitant freiner le mouvement de consolidation en cours dans le transport aérien en Europe.

L’ECTAA (le groupement des associations nationales d’agences de voyages et de voyagistes en Europe), l’ACI (Conseil international des aéroports), EU Travel Tech (association rassemblant des entreprises de technologie du voyage en Europe), BEUC (le Bureau européen des associations de défense des consommateurs) et EPF (la Fédération européenne des associations de défense des passagers des transports publics) ont en effet signé une déclaration commune, témoignant de leur crainte que la consolidation en cours du secteur n’entraîne des abus de position dominante de cinq groupes aériens.

Ces cinq groupes sont IAG (British Airways, Iberia, Vueling…), Air France-KLM, Lufthansa Group (Lufthansa, Brussels Airlines, Swiss, Austrian…), Ryanair (Ryanair, Malta Air, Lauda…) et easyJet. Si les opérations actuelles sont toutes menées à leur terme, ils détiendront plus de 73% du marché européen, contre 47% en 2005.

La Direction générale de la concurrence de la Commission européenne n’a pas, bien sûr, uniquement en ligne de mire le rachat d’ITA Airways par Lufthansa. La question de la position d’abus dominante vise aussi le rachat d’Air Europa par IAG, ce dernier ayant accepté il y a tout juste un an les conditions de la reprise de la compagnie aérienne espagnole à Globalia, concrétisant ainsi un projet engagé avant le Covid, mis à mal par la pandémie.

Air France-KLM est aussi dans leur viseur, qui vient de prendre 20% du capital de la compagnie scandinave SAS, au nez et à la barbe de Lufthansa (qui l’avait elle-même doublé sur le fil pour ITA Airways) : le groupe franco-néerlandais serait prêt à augmenter sa participation afin d’en devenir l’actionnaire de contrôle dans les deux ans. L’autre dossier épineux est la privatisation en cours de Tap Portugal, qui intéresse Air France-KLM, Lufthansa et IAG.

On notera aussi que les risques d’abus de position dominante ne concernent pas seulement les grands groupes aériens. Ainsi, avec le rachat en cours de WF Holding, la holding de Widerøe, par Norwegian Air Shuttle, le nouvel ensemble aérien détiendrait près de 60% du marché intérieur en Norvège. Le projet d’acquisition a reçu récemment l’approbation de l’Autorité norvégienne de la concurrence (NCA). Or, avec ce rapprochement, seuls deux transporteurs se disputeront le ciel norvégien, Norwegian et SAS. Même si la Norvège ne fait pas partie de l’UE, elle est tenue par des accords commerciaux et l’Europe pourrait là encore sortir du bois.

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