Répétez après moi: « Je sais que je ne sais pas »

Surtout essayez de ne pas vous demander continuellement comment vous vous sentez et si vous êtes heureux.

Il faut apprendre à dire « Je ne sais pas ». C’est ce qu’il faudrait oser dire quand quelqu’un pose une question sur le « monde de demain », le fameux monde d’après le confinement.

Les plus sages diront comme Jean Gabin dans sa célèbre chanson, « je sais que je ne sais pas » et franchement, tout le monde y gagnerait au change. Mais, hélas, avec le COVID-19, beaucoup de nos concitoyens sont devenus bavards. Étonnant, alors que l’incertitude est partout, que ce soit sur le plan sanitaire et économique, le COVID-19 a créé une nouvelle génération de personnes qui « n’ont pas besoin de tout comprendre pour tout expliquer » comme l’écrit joliment l’historien Ran Halévi.

Pourtant même en matière de préconisation de solution, il faut le faire avec humilité et nuances

Pour la simple raison que la réalité est toujours plus complexe. Prenons l’exemple de la baisse de la TVA à 6% pour sauver le secteur Horeca de la faillite globale. Vu de loin, on applaudit et on se dit que c’est ce qu’il faut faire sans plus attendre. Attention, je ne dis pas qu’il ne faut pas le faire, mais au sein même du secteur Horeca, il y a des doutes sur l’efficacité de cette baisse du taux de TVA de 21 % (ou 12%) à 6%.

La raison ?

La baisse de la TVA est un outil qui joue à fond quand il y a un problème de demande. Or, c’est plutôt une crise de l’offre. Or, chacun le sait, l’offre est plombée par les charges sociales et le coût du travail. Autrement dit, passer la TVA à 6% ne servira sans doute à rien. Et puis, qui aujourd’hui est encore prêt à faire crédit aux restaurateurs qui ont un souci de trésorerie ? Poser la question, c’est déjà y répondre.

De même, prenez le cas du télétravail, si on écoute les experts, c’est fait. Tout salarié qui peut le faire doit télé-travailler, c’est l’avenir, on ne discute plus. D’ailleurs, le télétravail a montré son efficacité durant le confinement et l’employeur a maintenant confiance dans l’employé qui télé-travaille. Les barrières psychologiques ont sauté, allons-y donc ! Là encore, attention aux jugements définitifs et pris dans l’excitation de l’actualité.

D’abord, parce que l’employé risque demain de changer d’avis

Motif ? Il va aussi découvrir qu’il risque de s’engouffrer dans une autre histoire, celle où d’après les statistiques compilées par un opérateur télécom (NordVPN), les salariés ont tendance pendant cette crise à travailler en moyenne de chez eux entre 2 et 3 heures de plus que d’habitude. Sans compter que l’éventuelle diminution du bien-être, de la créativité et de la loyauté envers l’entreprise pourrait effacer une partie des économies réalisées par les entreprises.

De même, l’explosion du télétravail – si elle a lieu – pourrait aussi signifier la mort lente du pouvoir des syndicats, car ils n’auront plus personne « sous la main ». Logique là encore, le lien de proximité, que les syndicats essaient de nourrir avec les salariés, a été brisé vu que la majorité des salariés se sont retrouvés confinés chez eux, en chômage forcé ou en télétravail.

Raison pour laquelle, les syndicats devront aussi se réinventer, en créant sur Internet des communautés de syndiqués qui partagent les mêmes intérêts. Aujourd’hui, leurs caisses sont à nouveau garnies grâce aux cotisations liées au chômage temporaire, mais demain ? Mon pari est qu’ils vont bloquer subtilement l’adoption massive du télétravail.

Mais chut, je risque de tomber dans le travers que je dénonce ici même

De même, les communes risquent de se retrouver face un « petit » souci budgétaire à régler rapidement, car si on sait que le télétravail n’est pas l’ami des cafétérias ni des salles de réunion, il va aussi devenir l’ennemi des… horodateurs !

Vous voyez via des exemples du quotidien, que le monde de demain n’est pas nécessairement celui dont on parle ici ou là. Méfions-nous des grandes théories définitives sur le monde de demain. Elles ne se vérifient presque jamais. Si c’était le cas, les éditorialistes en vue seraient également très riches. Et je ne le suis pas.

 

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