S’il n’en reste qu’un !

Les combats désespérés sont les plus beaux. Comme le village gaulois d’Astérix, à lui seul, Takao Shito résiste depuis plus de cinquante ans au milieu des pistes de l’aéroport de Tokyo-Narita. En effet, sa ferme est totalement enclavée au milieu des pistes et de voies de circulation d’avions utilisées par 250.000 vols par an.

Depuis 1966, le fermier japonais de 68 ans refuse catégoriquement de quitter ses terres. Au grand dam des autorités aéroportuaires du deuxième aéroport japonais qui voudraient bien l’expulser pour agrandir l’aéroport.

Il est intéressant en cette période où l’avenir de la planète préoccupe le monde de connaître les motivations profondes d’un combat qui semble à priori disproportionné.
Sans doute pas l’écologie. Takao Shito précise qu’il cultive des légumes bio sans pesticide, mais avec sans doute des effluves de kérosène. Non sans humour, il précise : « je ne peux pas déplacer mon terrain et espérer parvenir au même résultat à d’autres endroits », et d’ajouter : « Je m’amuse bien à faire pousser des légumes ici, ils ont un goût différent. »

Alors sans doute un mélange de tradition qui caractérise les Japonais, car sa famille cultive ces parcelles depuis trois générations et d’entêtement d’un homme qui lutte et milite depuis plus d’un demi-siècle. Mais Takao n’a jamais plié. Il multiplie les actions en justice et s’est placé sous la protection de la loi foncière agricole japonaise et affirme que cette terre était son gagne-pain.

Au début, la lutte fut dramatique, plusieurs policiers et militants furent tués. La situation s’est stabilisée et Takao Shito est toujours soutenu par de nombreux militants qui vieillissent avec lui.

Un collectif qui réclame la destruction de l’aéroport de Narita. Les possibilités d’accord entre les parties sont éloignées.

En dépit de promesses alléchantes de dédommagements financiers, il précise que l’argent n’est pas sa recherche. Mais, la lutte s’intensifie, car l’aéroport de Narita veut construire une troisième piste pour accueillir les touristes à l’occasion des Jeux olympiques qui se tiendront en 2020 à Tokyo.

En attendant, Takao Shito cultive ses terres au milieu de l’aéroport à la grande satisfaction de ses 400 clients.

Même s’il doit accéder à ses terres par les tunnels qui passent sous les pistes, qu’il est parfois soumis à des contrôles d’identité par les services de sécurité. Toujours pince-sans-rire, il précise : « Ils savent pourtant qui je suis. »

En tout cas, droit dans ses bottes, le rebelle veut que le monde entier sache qu’il y a un agriculteur nippon qui ne demande qu’à exploiter la terre de ses ancêtres.
Peu lui importe si cela perturbe la marche, pas vraiment triomphante, du progrès.

François Teyssier

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